Femmes, harcèlement de rue, une enquête d’Envoyé Spécial

Selon une enquête de l’INSEE, 1 femme sur 4 a peur dans la rue. Toutes les femmes interrogées, jeunes et moins jeunes, disent avoir subi une drague insistante, des injures, voire des frottements dans les transports en commun. Il est rare qu’elles portent plainte, tant ce type de violence quotidienne appartient à une sorte de banalisation de la rue. L’absence des réactions des témoins de ces scènes accroissent ce sentiment que la frontière est très floue entre drague et harcèlement.

J’ai participé à cette enquête d’Envoyé Spécial sur le harcèlement de rue des femmes, avec la journaliste  Virginie Vilar et trois autres réalisateurs. Seule dans les rues de jour, de nuit, dans des quartiers très divers, y compris des quartiers cossus, partout elle se fait accoster lourdement, harcelée bien plus que simplement draguée. Elle tente de parler avec ces hommes qui ne renoncent pas pour autant. L’enquête se focalise sur ceux qu’on appelle les frotteurs dans les transports en commun, notamment le métro. Ils repèrent leur victime bien avant qu’elle ne monte dans une rame et se frottent en érection dans leur dos. Un psychiatre analyse le profit de ces hommes, soit très jeunes, soit plutôt âgé, pas sûrs d’eux, sans expérience, et surtout incapables de prendre en compte le désir réel de l’autre. Certains frotteurs publient leurs commentaires sur Internet, quand ce ne sont pas des photos prises à la volée. La loi n’est pas assez précise, elle ne prend pas vraiment en compte ces comportements déviants qui mènent la vie dure aux femmes dans les rues, alors qu’ils se généralisent. Une sensibilisation s’impose, afin que le législateur suive la réalité sur le terrain, et qu’alors les femmes portent enfin plainte.

Karim Baïla, Grand Reporter agence Capa, Envoyé Spécial, 30 novembre 2016